Après la publication d’une précédente étude « Relations aux publics connecté(e)s » (avril 2016), La Maison forte et Artishoc ont entrepris une recherche-action Le Tour de France : vers une culture des Communs durant deux ans (2018/2019). L’enjeu était de questionner le malaise sourd et récurrent qu’expriment de nombreuses équipes/structures culturelles. Quelle place (re)prendre dans l’espace public quand toutes les initiatives « culturelles » semblent en compétition ? Quel sens donner à l’Action ? Quelle place donner aux artistes, à l’œuvre quand la culture digitale a pris le pas sur toutes les vieilles recommandations de l’art élitiste, élitaire pour tous… quand les plus jeunes désertent des équipements assimilés à une culture bourgeoise, nostalgique ou dépassée ? — Fini le temps où l’excellence culturelle et ses réseaux distinguaient la vraie Culture de la culture populaire de divertissement.
Et, comme si le chantier de refondation/questionnement n’était pas suffisant, une épouvantable crise sanitaire s’invitait dans le débat, renvoyant les établissements culturels à une « consommation non essentielle », obligeant à des fermetures à répétition pendant deux ans (2020-2021). Obligeant également le Tour de France : vers une culture des Communs à suspendre ses rendez-vous sur le territoire. Cette crise ajoutait donc à la crise et accentuait encore l’isolement des équipes, des artistes, demandant aux publics d’inventer d’autres accès à la curiosité : lectures, écoutes musicales, culte de la visio… Pour faire bref : un record de consultation des plateformes de contenus : Deezer, Spotify ou Netflix en sortent les grands gagnants (les GAFAM avec eux).
Après ces deux années, la question reste entière : comment imaginer une Transition pour l’institution culturelle, ses représentants, ses équipes, voire même ses artistes ? En filigrane bien sûr, il sera question d’interroger le sens contemporain d’une « politique culturelle » qui renouerait avec les enjeux premiers d’une politique publique de la culture : L’émancipation individuelle et collective, au sens où l’Éducation populaire l’a posée après-guerre, « le Oser savoir » de Kant en étendard (former des citoyens cultivés, c’est-à dire libres de choisir leur démocratie et leurs représentants dans l’intérêt Commun). Pas exactement la vision de Malraux, ni de Lang… !
La méthode de cette exploration : rencontrer les espaces sociaux où se mettent en œuvre les conditions contemporaines de changement social et d’émancipation. Voir comment ces questions s’incarnent sur les terrains de l’économie sociale et solidaire, du logiciel libre et du développement durable. Pour constater que le développement de ces alternatives repose principalement sur un projet politique des Communs. Étudier ce qui fait Commun entre ces secteurs et comment ces approches, ces organisations, ces philosophies pourraient impacter le secteur culturel pour brosser des scénarios de changement.
Ce travail peut sembler bien ambitieux, bien vaste, trop systémique peut-être : nous nous contenterons ici de mettre en place des dispositifs de liens en invitant à la rencontre de personnalités, de projets, d’actions qui sondent le monde contemporain et, en ce sens, participent activement à la définition de sa Culture, nécessairement plurielle, polysémique, hétérotopique, transculturelle.
Un projet soutenu par le Ministère de la culture, la fondation Crédit Coopératif et l’ONDA.