En pleine refonte de son site Internet, le théâtre du Merlan à Marseille ne veut pas passer à côté de la transition numérique et revendique l’importance de l’utilisation des données statistiques issues de la billetterie et des réseaux sociaux. Mais beaucoup reste à faire. Interview de Christopher Marc, responsable communication.
Par Rossana Di Vincenzo
Quelle utilisation faites-vous des données analytiques fournies par les logiciels de billetterie, Google ou les réseaux sociaux ?
Au Merlan c’est le responsable billetterie (Philippe Charbonnière) qui se charge de faire des statistiques grâce à notre logiciel Sirius quant à la fréquentation. Nous avons plusieurs méthodes, on les a systématisées depuis le début de la saison. Sur chaque spectacle on a une répartition des spectateurs qui nous est donnée, en fonction des données géographiques, du remplissage, des actions sur les newsletters, de ce qui a déclenché les ventes, de la répartitions des quotas RP… On en ressort tout un panel de population, ce qui nous aide à avoir une vision plus précise du public qui est dans la salle sur chaque spectacle.
C’est donc un travail collectif entre les différents services (communication, billetterie, RP…) ?
Sur les statistiques publics, c’est vraiment Philippe Charbonnière qui a la main. Cependant, on reste sur des données qui sont parfois approximatives, on le sait, on n’a pas toutes les infos. Les commandes sont généralement aux alentours de trois places par acheteur, et on ne peut extraire uniquement que les données de la personne qui passe la commande. Cela rend les informations forcément fébriles. Cela nous donne tout de même une vision globale, qui peut être cohérente avec ce que l’on voit dans la salle. Au Merlan, le public est composé en majorité de femmes et de jeunes. Les statistiques peuvent nous éclairer à certains endroits, mais parfois on est aussi très surpris sur la répartition géographique. C’est une bonne chose, car cela permet de voir aussi que la fréquentation bouge en fonction de la programmation. Ces données nous aident beaucoup et on a envie de les améliorer, c’est nécessaire. Comment parler à un public, avec quel support : on touche mieux les gens quand on les connaît mieux.
Votre site Internet joue-t-il également un rôle dans l’étude de la fréquentation et des publics ?
Il est obsolète et on est justement en train de réfléchir à un nouveau site. On utilise l’analytique via Google analytics, mais on ne pousse pas non plus. C’est moi qui m’en charge, mais c’est un univers qui est assez complexe. Ce n’est pas toujours facile de savoir quelles données sont réelles. Comment les prendre en compte, dans quel cadre ? J’ai fait une formation courte sur l’utilisation des réseaux sociaux, donc j’ai butiné aussi aussi d’autres logiciels qui permettent de comprendre un peu mieux ce qui fonctionne ou non sur notre site, mais c’est vraiment un chantier qu’on se donne cette année avec la création de ce nouvel outil en collaboration avec des prestataires qui vont pouvoir aussi nous éclairer là-dessus.
Qu’en est-il des réseaux sociaux ?
En ce qui me concerne, j’utilise surtout Facebook, on est également sur Twitter mais on essaie de se répartir les tâches. De toutes façons c’est très difficile d’être présents partout. C’est beaucoup de travail. Je me concentre sur Facebook pour l’analytique, parce que d’un point de vue purement pratique, il se trouve qu’il y a une utilisation de Facebook qui est très forte à Marseille, beaucoup plus que Twitter qui est très parisien et n’a pas le même impact ici. On essaie d’analyser un peu ce qui se passe sur notre page Facebook, on a eu une grosse progression (3655 « j’aime » à ce jour) en une saison, mais on a encore beaucoup de chemin à faire. Cela fait vraiment un an et demi qu’on s’est plongé dedans pour essayer de faire fonctionner les choses et voir ce qui peut être améliorer. Les statistiques nous servent à voir ce qu’on peut faire, comment gagner du clic, des partages etc…
Ces actions mises en places sur l’utilisation du numérique sont-elles partagées par tout le monde au sein du Merlan ? Ou n’est-ce que du ressort du service communication ou des relations publiques ?
C’est un gros travail justement, et d’ailleurs depuis mon arrivée, je me bats pour que tout le monde au sein de l’équipe soit présent sur les réseaux sociaux. Ça commence par là. Mais ça a encore du mal à prendre. L’année dernière, on a créé un compte Facebook pour les relations publiques, ça commence à fonctionner mais il n’y a pas encore une dynamique très forte. On trouve notre place petit à petit mais c’est très long, comme se dire que le travail des relations publiques a sa place sur Facebook et que ça fait partie des outils indispensables aujourd’hui. J’incite les gens à partager les posts avec leur profil, mais ça a vraiment du mal à prendre, on sent qu’il y a une frontière pour l’instant qu’on a du mal à franchir. Les réseaux sociaux, ça reste du domaine privé pour certains et il y en a qui n’y touchent pas du tout. C’est comme ça. Mais ça va venir.
D’autant que ces données sont de plus en plus sollicitées pour des compte-rendus ou bilans administratifs ?
C’est la logique des choses. On nous demande de plus en plus de statistiques au niveau des tutelles, les chiffres de fréquentation et de billetterie notamment. Ce sont des données qui sont de plus en plus appréciées au niveau institutionnel. Il ne faut pas les négliger car ça peut vraiment jouer en la faveur des structures.
Le rapport fait d’ailleurs état d’une nette augmentation des ventes en ligne, qu’en est-il au Merlan ?
J’attends les chiffres pour voir l’évolution par année mais je ne les ai pas encore. Il faut savoir qu’on est vraiment repartis de zéro depuis cinq ans. Avant ça, c’est un prestataire extérieur qui gérait nos réservations en ligne, on n’avait aucune visibilité là-dessus. On a créé ce premier site il y a six ans, aujourd’hui je pense qu’on est sur un bon quart des ventes sur merlan.org. On a
aussi essayé beaucoup de choses sur Facebook en terme de ventes, mais je ne sais pas si ça a réellement un effet. On a essayé de faire de la réservation via des posts Facebook – ce qui n’a plus l’air d’être possible aujourd’hui – c’est une fonction qui nous permettait d’avoir moins d’intermédiaires. Mais notre site n’étant pas en responsive design, il n’est pas assez ergonomique pour permettre la réservation en ligne par ce biais. Je pense que le jour où on améliorera vraiment la navigation, les gens réserveront sans doute plus facilement via les post Facebook. Il faut aussi se méfier de l’impact des réseaux sociaux dans la concrétisation des choses. Ce n’est pas parce qu’on est « visible » grâce une image ou un post qui fonctionne bien, que les gens réservent au final. Au service communication de toutes façons, ce qu’on cherche ce n’est pas tant le taux de clic et de réservation à travers les posts que la visibilité finalement. Après on sait que quand on envoie une newsletter dans la journée, il y a plus de réservations le lendemain, mais de manière générale en terme de ventes, rien n’est acquis.
Quelles actions concrètes mettez-vous en place sur les réseaux sociaux en terme d’e-marketing ?
Même si on n’est pas spécialistes, il y a des choses simples qui se font vite et qui sont très pratiques, les publicités Facebook par exemple sont assez efficaces. Quand on a arrive à affiner le ciblage, ça devient vraiment intéressant en terme de visibilité et de « like ». Cela permet à des gens qui n’en auraient pas eu l’idée, de « liker » la page du Merlan. Même si je ne suis pas forcément pro-pub, je m’aperçois que sur les réseaux sociaux, je préfère avoir une bannière concernant quelque chose qui m’intéresse que l’inverse. Mais bon on n’a pas un poste de community manager à plein temps qui serait dédié à ça non plus, il y a forcément des choses qu’on pourrait mieux faire. On s’est tous auto-formé sur ce genre d’outils. On n’est pas des grands techniciens, mais on essaie de faire quand même.
C’est un regret ? Le manque de formation ?
J’en ai faite une et elle m’a plutôt rassuré sur certains points. Elle m’a permis de voir qu’on a une bonne analyse des choses, de ce qui nous manque et de ce qu’on arrive à bien faire dans ce cadre. On est encore entre deux mondes, l’ancien avec le « tout-papier » et le « tout-numérique ». Très rares sont les structures qui prennent en charge un poste à temps plein là-dessus. Le rapport d’investissement est toujours dur à faire passer, quand on voit un budget de communication globale, tout ce qui concerne le print, en comptant les relations presse et l’élaboration des programmes reste assez énorme. Finalement les investissements sur le numérique sont encore très faibles en proportion. Il faut réussir à inverser la tendance car cela permet de toucher d’autres types de publics. Même s’il faut garder les deux, le numérique doit encore se développer.