La neuvième Rencontre TMNlab s’est tenue le 14 décembre 2015 à la Comédie-Française. C’est la découverte des travaux de Dominique Pasquier, La sortie au théâtre, réseaux de conseil et modes d’accompagnement, publié aux Presses Universitaires de France, Sociabilités et sortie au théâtre, étude commandée par le ministère de la Culture et de la Communication parue en 2013, et « Moi je lui donne 5/5 ». Paradoxes de la critique amateur en ligne, ouvrage collectif paru aux Presses des Mines, qui nous a inspiré le sujet de cette première Rencontre de la saison 2015/2016.
Nous avons souhaité, à travers une table-ronde le matin et un atelier en petits groupes l’après-midi, réfléchir ensemble au renouveau de la prescription à l’ère numérique : prescription de pair-à-pair, nouvelles communautés et élargissement de la sphère des accompagnants, influence et paradoxe des blogueurs, mais aussi position des médias comme animateurs de communauté. Aux côtés de Dominique Pasquier, nous avons donc convié Caroline Gouin, directrice de la communication de Télérama, Catherine Zavodska, fondatrice de Danse Aujourd’hui, et Gladys Lioné, blogueuse sur Gladscope.fr et créatrice des GladParty.
Cette rencontre était organisée en partenariat avec le Centre national du Théâtre. Merci à Marie Plassat de la Comédie-Française pour la coordination.
Matinée : table-ronde
BIENTÔT DISPONIBLE > Réécoutez le podcast : l’intervention de Dominique Pasquier est complète, en revanche la seconde partie de la table-ronde est interrompue.
Notes sur l’intervention de Dominique Pasquier
Bibliographie complémentaire :
Ouvrage de Dominique Pasquier
> Le « droit de tousser ». Spectateurs de théâtre face à l’ascèse corporelle (référence au « Droit de siffler »)
> Spectateur de théâtre : l’apprentissage d’un rôle social (PDF)
> La sortie au théâtre. Réseaux de conseil et modes d’accompagnement (PDF)
Autres auteurs :
> Sociabilité, prescription, coprésence (référence en cours)
> Les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique / Éléments de synthèse 1997-2008 par Olivier Donnat
Le théâtre est toujours étudié dans son rapport à l’oeuvre, on oublie la question sociale qui s’opère. Note : les critiques professionnels sont dans ce cas, s’intéressent à l’oeuvre. L’accompagnement au théâtre, introduit dans pratique culturelle des francais : nouveau, existait dans d’autres secteurs culturels mais pas au théâtre. Il existe une fracture pratique masculine/féminine.
L’offre est peu lisible / peu d’accès à l’information, il y a un décalage net entre la production/l’offre et le travail de guidage (médiation).
50% des français ne sont jamais allés au théâtre. 1 sur 5 seulement au moins une fois dans les 12 derniers mois.
Réseau pyramidale, petits nombres de spectateurs qui assument le rôle de conseiller auprès de leur entourage, la relations de conseil n’est jamais donnée d’emblée, elle est relative à une confiance et une connaissance mutuelle construite dans la durée, engagement du conseil vécu comme dangereux pour celui qui le donne (on peut perdre du crédit social).
3 types de conseillers : les organisateurs (prudent, occasionnel) voir étude pour les autres
leader d’opinion se surinforment auprès de l’info médiatique puis influencent une petite communauté autour d’eux
motivation du leader : etre reconnu comme plus compétent que les autres (c’est flatteur), vivent un échec de choix, une déception, comme une responsabilité personnelle
Autant d’homme que de femme mais façon de sortir très différente
Sortie en couple : plus facile à mettre en oeuvre, c’est la femme qui s’en occupe, les femmes souhaitent sortir meme sans connaissance du théatre
Sortie avec des amis réguliers : plus répandu à Paris (56% de pratiquant contre 19%, 35% assidus contre 6% à l’échelle nationale) cause offre et nombre de personnes qui vivent seules
Phénomène à observer :
féminisation de la culture cultivée
(récupérer travaux Olivier Donnat sur site ministère / la relation entre éducation artistique et profil de pratique, décalage deréussite scolaire fille/garçon, moindre homogamie culturelle dans les couples)
communaute de gout / de sortie
master sens critique
Sortie avec des amis de theatre ou des inconnus autour d’un gout commun ? Sur quoi peut-on agir ?
Prescription et sociabilité, témoignages et mise en perspective
Interventions de nos invitées et échange, entre elles et avec les participants.
> Caroline Gouin, Directrice Communication de Télérama, sur le renouveau de Telerama.fr et de sa communauté en ligne
> Gladys Lioné, la place des blogueurs et la formation de communauté d’amateurs éclairés
> Catherine Zavodska, son expérience d’animation d’une communauté de spectateur en ligne, autour de la danse
Après-midi : ateliers
L’après-midi nous avons proposé aux participants de se réunir en groupe pour réfléchir autour de thématiques dégagées des grandes lignes de l’intervention du mati. Retrouvez ci-dessous les propositions soumises aux participants. La forme des ateliers permet un échange nourri, nous avons debriefer avec certains participants pour néanmoins faire évoluer la forme pour les rencontres à venir.
Piste 1 : qui prescrit ?
L’étude souligne le peu d’espace pour la critique médiatique et le manque général de dispositifs d’aide au choix…
Comment un média peut réinventer sa place de prescripteur culturel ? Groupe de travail avec Caroline Gouin, autour du projet Télérama Global. Coopération institution/média au service de la communauté de lecteur, enrichir un espace commun au service du spectateur (pour le nourrir et en faire un ambassadeur) dans le cadre de partenariats institution/média.
Les spectateurs assidus sont souvent les plus hostiles, comme s’ils déniaient aux critiques le monopole du jugement sur une pièce. « La
critique c’est moi qui me la ferai ! » déclare un spectateur interrogé. Plus largement, force est de constater que les spectateurs, même s’ils ne nourrissent pas d’animosité particulière vis-à-vis des critiques de théâtre, s’y intéressent très peu et en tout cas n’en font jamais un guide
pour le choix des pièces. (…) En revanche, du côté des pièces du théâtre privé, les avis des internautes postés sur les sites de vente de billets
à prix discount semblent jouer un certain rôle. Ces commentaires sont souvent courts et relèvent surtout d’impressions subjectives : on est à mille lieux du travail de la critique experte avec ses remises en perspective de l’oeuvre, ses informations sur le sens donné par le créateur
à son travail ou ses analyses du spectacle. (…) Ces critiques sans appareillage critique semblent agir comme une aide au choix, surtout pour les spectateurs occasionnels.
Quelle reconnaissance de la critique amateur et quels espaces d’expression dans les théâtres ? Idée des bourses de critiques de spectateurs…), modèle d’Allociné, de BilletReduc (mais il faut être client pour critiquer), La Fourchette… Retour sur les expériences portées par des lieux qui n’ont pas fonctionné (ex Le Rond-Point ?). Intérêt de la mutualisation pour suivre la circulation des œuvres. Reconnaissance du dédain des avis de spectateurs au sein de certains théâtres.
> Favoriser le renouvellement des publics et la sortie occasionnelle, notamment dans des lieux très marqués par une fréquentation de public fidèle
Les conseillers relais sont des pratiquants très assidus, des « hyper publics », qui jouent un rôle très important dans la diffusion de l’information pour le secteur subventionné – une personne interrogée se définit comme « une petite fourmi qui permet aux théâtres de bien fonctionner ». Sensibles à la reconnaissance qu’ont les théâtres pour leur prosélytisme en faveur du spectacle vivant en général, et de la programmation d’une salle en particulier, ils sont désireux d’obtenir certaines gratifications, fussent-elles seulement symboliques.
Comment reconnaître et nourrir les prescripteurs locaux, au sein des théâtres ? Comment les outils numériques peuvent enrichir nos échanges avec nos publics, la création de relations privilégiées avec les artistes de passage dans nos lieux ?
> Catherine Zavodska travaille actuellement à la rédaction du cahier des charges d’une application mobile dédiée aux spectateurs qui utilise une technologie innovante permettant aux théâtres et aux artistes d’envoyer des messages ou contenus aux spectateurs présents dans le théâtre et de recevoir des messages des spectateurs.
Piste 2 : avec qui va-t-on au théâtre ?
Si près d’un Français sur cinq va au théâtre au moins une fois par an, seuls 4% effectuent cette sortie seuls. Deux formes d’accompagnement prévalent : la sortie en couple et celle avec des amis avec lesquels se pratiquent des sorties au théâtre régulières. La première est beaucoup plus répandue chez les hommes, et la seconde recrute une forte majorité de femmes.
+ la participation à un groupe permet de socialiser le risque théâtral : les moments de convivialité après le spectacle sont décrits comme une possible compensation aux pièces ratées (« Si le théâtre est pas bien, le restaurant sera bien…»).
Quelle service (inter-théâtre) pour créer de la rencontre/sociabilité autour de la sortie théâtrale ? Les nouvelles formes de sociabilité largement favorisées par le numérique peuvent-elle être un levier pour les spectateurs de théâtre (et peuvent-elle être portée par les institutions seules ou en mutualisation ?) Comment concevoir un service de sortie au théâtre façon OnVaSortir ou le Colunching mais spécialisé ? Peut-on inciter les spectateurs à se réunir par communauté d’intérêt comme avec la GladParty ou le SMV ? Et quel sens ça peut avoir ?